Vous faites de la musculation. Vous avez mal en haut de l’épaule. C’est sûrement une « arthropathie acromio-claviculaire » ! En clair, votre omoplate écrase votre clavicule.
Votre clavicule part du sternum, l’os en forme de cravate au centre du thorax. Elle rejoint le sommet de l’omoplate sur un bec osseux appelé « acromion ». La jonction porte le nom d’articulation acromio-claviculaire. Quand cette dernière est abîmée, on parle d’arthropathie acromio-claviculaire. La clavicule est le seul os qui suspend le membre supérieur au buste. En effet, derrière, l’omoplate n’est accrochée au thorax que par des muscles. De fait, quand ces derniers travaillent, elle glisse sur les côtes et se balance comme une cloche. Lorsque le bras s’avance, elle vient comprimer la clavicule qui absorbe une partie des contraintes mécaniques grâce à sa forme en S. Mais quand les charges sont importantes, quand les séries s’enchaînent, il arrive que ce ne soit pas suffisant et que l’articulation acromio-claviculaire souffre.
Au début, vous avez mal après les séances de musculation. Rapidement, vous reconnaissez les exercices les plus agressifs pour votre clavicule. En premier lieu, l’incontournable développé-couché déclenche des douleurs, surtout quand vous montez la barre et que l’omoplate vient compresser la clavicule. Un peu plus tard, c’est l’écarté, le Butterfly, le pull-over. Par la suite, vous souffrez lors des mouvements inverses : le Rowing, l’oiseau et le tirage horizontal ou vertical. Cette fois, la souffrance survient surtout lors du retour de la charge, notamment si son amplitude est excessive, si vous ne freinez pas suffisamment et surtout si vous provoquez des vibrations en faisant taper les plaques de fonte. Votre médecin du sport retrouve les douleurs quand il amène votre coude sous votre menton et qu’il reproduit le mécanisme de compression ! Il vous fait mal également quand il appuie sur l’extrémité externe de votre clavicule.
Les radios sont souvent suffisantes pour confirmer le diagnostic. Le bout de votre clavicule apparaît irrégulier, comme grignoté. Souvent, on remarque des petits trous dans l’os, on parle de « géodes ». Le côté de l’omoplate est préservé car il est plus épais et reçoit plus de vaisseaux sanguins. À un stade plus tardif, l’arthropathie devient arthrose. Le cartilage est usé et la clavicule semble toucher l’acromion. Les fissures osseuses sous-jacentes se reconstruisent de façon volumineuse et anarchique. On constate la présence de becs osseux appelés aussi « ostéophytes ». À l’inverse, au début, la radio peut s’avérer normale. L’IRM visualise alors un œdème osseux sous le cartilage.
Si vous souffrez de l’épaule en faisant de la musculation, il est hautement probable que vous soyez victime d’une arthropathie acromio-claviculaire. Pourtant, la vigilance s’impose car, à cet endroit, d’autres blessures peuvent se produire. Une démarche diagnostique rigoureuse est indispensable car les traitements sont différents. Il peut s’agir de tendinites. Le plus souvent, ce sont les tendons situés en haut de l’os du bras qui frottent sur l’omoplate. On parle de « conflit sous-acromial ». Dans ces conditions, les mouvements d’élévation sont douloureux. Plus rarement, le ménisque de l’épaule est abîmé pour cause de subluxations répétées et insidieuses. Cette fois, l’ouverture en Butterfly et le tirage derrière la nuque sont responsables des douleurs.
Il faut modifier votre façon de vous entraîner. Si les lésions sont minimes, cela peut suffire. Si les lésions sont plus importantes, cette stratégie s’impose après traitement médical pour éviter la récidive. Vous abusez des exercices écrasant la clavicule. Changez votre geste au développé-couché. Partez coudes au corps et paumes face à face. C’est possible en utilisant des haltères séparés ou une barre à poignées perpendiculaires, c’est envisageable sur certains appareils de développé-assis. Sur les exercices de pectoraux et de dorsaux, réduisez les amplitudes de mouvement, ne rapprochez pas trop les mains. Augmentez le nombre de répétitions très progressivement ! Soyez encore plus prudent concernant les charges. Relisez l’article « Une série, ça suffit ! » Vous serez plus efficace sans vous blesser. Surtout si vous débutez la musculation, laissez le temps à votre appareil locomoteur de s’adapter. Variez les exercices, c’est indispensable pour répartir les contraintes articulaires ! Ne vous contentez pas du développé-couché pour travailler vos pectoraux.
Au-delà des conseils d’entraînement, un traitement médical est souvent nécessaire. Parfois, il faut arrêter la musculation ou les mouvements douloureux quelques semaines et prendre des anti-inflammatoires pour freiner le grignotage articulaire. Comme il s’agit d’une souffrance du cartilage et de l’os sous-jacent, il est bon de nourrir ces tissus. Pour le premier, silice, chondroïtine et glucosamine sont les bienvenues. Pour le second, calcium et vitamine D sont conseillés. Si les douleurs persistent au-delà de 1 à 3 mois, une infiltration de corticoïdes est envisageable. Loin d’avoir un rôle de « cache-misère », elle soigne la composante biologique de la douleur. Lorsqu’une articulation s’abîme pour cause de contraintes mécaniques excessives, des petits fragments cartilagineux et osseux se décrochent. Les globules blancs arrivent pour nettoyer les débris, c’est l’inflammation. Souvent, le processus s’emballe et les tissus sains sont rongés à leur tour ! L’infiltration de corticoïdes freine ou arrête ce phénomène d’autodestruction ! Pour plus de précision, ce geste est réalisé sous radiographie. En effet, l’articulation acromio-claviculaire est très étroite et il est difficile d’y glisser précisément l’aiguille. Pour s’assurer d’être au bon endroit, le radiologue injecte d’abord un produit de contraste qui apparaît en blanc dans la fente articulaire. À l’issue, il faut limiter vos mouvements de bras dans la vie quotidienne pendant 2 à 5 jours puis arrêter la musculation au moins 3 semaines. La reprise se fait très progressivement, en privilégiant la qualité du geste et les charges légères. Il est possible d’effectuer 2 à 3 infiltrations. En cas de gêne persistante, vous pouvez solliciter l’avis d’un chirurgien. Le geste classique consiste à sectionner l’extrémité externe de la clavicule. Du coup, elle ne touche plus l’acromion et les tissus abîmés sont enlevés. Vous ne souffrez plus ! En pratique, on constate que la disparition de ce contact articulaire ne perturbe pas le fonctionnement de l’épaule. En effet, l’omoplate reste accrochée à la clavicule par d’autres ligaments situés en son milieu. Vous pouvez reprendre très progressivement la musculation 3 à 4 mois après l’intervention.
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