Grossesse et sport : des réponses à vos questions

Grossesse et sport : des réponses à vos questions
Grossesse et sport : des réponses à vos questions

Longtemps, la grossesse des sportives était synonyme d’arrêt d’activité sportive, mais les connaissances physiologiques des adaptations à l’effort, les données d’études concernant les grossesses, l’accouchement, et le suivi des femmes sportives ont aidé à poser les jalons de recommandations d’une pratique sportive au cours de la grossesse. « La pratique d’une activité physique et sportive doit être conseillée à toutes les femmes enceintes avec un volume d’activité physique de 150 min à 180 min, qui doit être adapté à la santé, à la condition physique et à l’évolution de la grossesse » (d’après la Haute Autorité de santé –Prescription d’activité physique et sportive pendant la grossesse). 

Par Carole Maître – gynécologue au département médical de l’INSEP

Le maintien d’une activité sportive est- il compatible avec la grossesse ?

L’activité physique est favorisée par une adaptation cardio-respiratoire propre à la grossesse. Cela engendre plusieurs effets positifs qui se stabilisent au 5e mois de grossesse :

  • Un meilleur apport d’oxygène aux muscles du fait de l’augmentation du débit cardiaque, du volume plasmatique et du volume d’éjection systolique ;
  • Une stimulation des centres respiratoires avec une respiration plus ample, sans augmentation de la fréquence respiratoire ;
  • Au final, une amélioration de la consommation maximale d’oxygène (VO2max) qui peut atteindre 20 à 30 %. Cette adaptation à l’effort va perdurer de 6 mois à 1 an lors du post-partum.

Cependant, le développement abdominal de l’utérus gravide1, la prise de poids, la survenue d’une hyperlaxité (liée aux hormones : la progestérone et la relaxine) à partir du 5e mois, et le risque de fragiliser le périnée amènent à éviter les sports dits « portés » comme la course à pied ou les sports de raquettes à partir de 24 semaines. Il y a donc une évolution de la pratique au cours des trimestres de la grossesse.

Quel type d’activité sportive et à quelle intensité, durée, fréquence des séances peut-on commencer ou poursuivre une activité sportive ?

L’activité physique est recommandée en cours de toute grossesse physiologique mais il existe des contre-indications lors des grossesses pathologiques et des règles de bonne pratique. Le suivi et l’avis médical, chaque mois, sont essentiels.

La fréquence des séances : 3 à 5 fois par semaine, ou mieux au quotidien ;

La durée des séances atteint progressivement 30 minutes par jour chez les femmes sédentaires qui vont débuter une activité, elle peut être de 40 à 60 minutes pour les sportives déjà régulières ;

L’intensité : elle peut être appréciée par la fréquence cardiaque (FC) ou le test de la parole qui paraît plus simple en pratique.

La FC maximale théorique est diminuée chez la femme enceinte par rapport à la femme non enceinte, il faut se référer aux plages de FC du tableau :

PLAGE DES FRÉQUENCES CARDIAQUES MODIFIÉES CHEZ LA FEMME ENCEINTE
PLAGE DES FRÉQUENCES CARDIAQUES MODIFIÉES CHEZ LA FEMME ENCEINTE

Le test de la parole détermine la zone d’intensité modérée : c’est le fait de mener une conversation normale sans essoufflement, pendant la pratique sportive.

Le type d’activité

Certains sports sont incompatibles avec la grossesse du fait des risques de chute ou de traumatisme. Il est conseillé de choisir ou garder une activité physique compatible avec la grossesse physiologique. Les sports à éviter sont de façon non exhaustive les sports collectifs, les sports de combat, certaines disciplines en athlétisme comme le lancer, les sauts (haies, hauteur, longueur), la planche à voile… La plongée sous- marine est contre-indiquée.

ACTIVITÉS SANS RISQUE POUR LA GROSSESSE (LISTE NON EXHAUSTIVE)
ACTIVITÉS SANS RISQUE POUR LA GROSSESSE (LISTE NON EXHAUSTIVE)

Les activités sportives possibles sont nombreuses, sous couvert d’une surveillance médicale mensuelle et en l’absence de symptômes, en particulier de maux de tête, vertiges, essouf­flement inhabituel, contractions utérines ou douleurs, douleurs du mollet, saignement, perte de liquide qui entraîner l’arrêt de la séance et un avis médical.

Parmi les activités recommandées :

Des activités en endurance associées à des exercices en résistance contre le poids du corps et à des exercices d’assouplis­sement.  

  • La marche reste l’activité la plus pratiquée, marche rapide, marche nordique ; 
  • La natation peut être pratiquée jusqu’à terme. ; les nages sur le dos seront privilégiées au 3e trimestre pour limiter l’hyperlordose (accentuation de la courbure lombaire). L’aquajogging, l’aquabiking, l’aquagymnastique adaptés à la grossesse apportent un caractère ludique à la pratique ;
  • Le yoga adapté à la grossesse avec des exercices respira­toires et posturaux ;
  • Le vélo jusqu’au 5e, voire 6e mois, d’intensité modérée à partir du 5e mois. Le vélo elliptique est possible. Le vélo stationnaire pourra être une substitution utile jusqu’à ce que le dévelop­pement abdominal au 3e trimestre le rende difficile.

D’autres activités sont possibles, si elles sont pratiquées avant la grossesse et en fonction du niveau de pratique, après avis du professionnel de santé, informé du type d’activité.

Pour toutes ces activités s’appliquent les principes de fréquence 3 à 5 fois par semaine, durée de séance inférieure à 60 minutes et intensité modérée.

  • La course à pied sur terrain souple jusqu’au 5e mois d’une grossesse physiologique, en intensité modérée (60 % FC max), sans dépasser une séance d’une heure par jour puis de 30-45 min/jour au 5e mois. La course à pied ne sera pas pratiquée deux jours consécutifs ;
  • La marche rapide remplacera la course à pied au cours du 6e  mois (30-40 min deux fois par semaine) ;
  • Des exercices de gainage adaptés sont possibles, jusqu’au 4e mois ;
  • Le tennis, de préférence sur terre battue ou en double, sans objectif de match jusqu’ au 4e mois ; 
  • Le golf jusqu’au 7e mois.

À partir du 4e mois, les exercices sur le dos sont à éviter car ils peuvent gêner le retour veineux, du fait du développement de l’utérus en intra-abdominal.

Pour les sportives régulières, il est recommandé de pratiquer 5 séances par semaine avec un jour de repos par semaine et le week-end.

  • Pratiquer des séances pouvant évoluer progressivement de 1 h à 30 min selon l’activité ;
  • Prévoir des périodes d’échauffement (5 min), d’étirement (5 min) et de récupération ;
  • S’hydrater suffisamment avant, pendant et après les exercices ;
  • Préparer une collation post-séance d’entraînement.

En règle générale, au-delà du 2e mois de grossesse, l’objectif n’est pas la compétition mais l’entretien des acquis techniques, de la capacité cardio-respiratoire et de la masse musculaire.

La poursuite d’une activité physique est-elle à risque pour le fœtus ?

Il n’y a pas de risque à continuer de pratiquer un sport en respectant les « règles de bonne pratique », le type de sport compatible, la durée et l’intensité des séances. Le risque de fausse couche n’est pas corrélé à une pratique adaptée au cours d’une grossesse physiologique. Il n’y a pas non plus de risque de retard de croissance intra-utérin ou de prématurité liée à une pratique sportive modérée.

Quels sont les bénéfices d’une pratique régulière pendant la grossesse ?

Les bénéfices sont nombreux et bien documentés :

  • Un bien-être psychique et une meilleure acceptation des modifications corporelles, une amélioration des troubles du sommeil fréquents en début de grossesse ;
  • Des symptômes moindres liés aux douleurs de l’abdomen au 4e mois ;
  • Un risque de surpoids diminué. L’activité physique limitant le risque de surpoids permet d’obtenir un retour au poids d’avant la grossesse, au 6e mois du post-partum comme le recommande la HAS ;
  • Une diminution du risque de diabète gestationnel : l’activité physique induit une amélioration de la sensibilité à l’insuline, une meilleure tolérance au glucose ;
  • Une diminution du risque de pré-éclampsie, seulement chez les sportives ayant pratiqué une activité vigoureuse avant la grossesse et continuant une activité modérée pendant la gestation ;
  • Une diminution des douleurs lombaires et des symptômes veineux chez les sportives pratiquant des activités aquatiques ;
  • Une diminution significative des prescriptions médicamen­teuses pour dépression du post-partum chez les femmes ayant pratiqué tout au long de leur grossesse une activité physique par rapport aux femmes ayant arrêté toute activité physique.

Ces bénéfices ont tous été observés pour une pratique d’intensité modérée maintenue pendant toute la grossesse.

L’accouchement par césarienne est-il plus fréquent ?

Le recours à une césarienne ou à une extraction par forceps apparaît plus faible chez les femmes sportives pendant la grossesse. La durée du travail apparaît plus courte chez les sportives ayant poursuivi une activité physique en endurance.

Conclusion

La pratique sportive adaptée à l’état de grossesse doit être encouragée, pratique régulière, évoluant en fonction des trimestres de la grossesse, et choisie par la femme en concertation avec le professionnel de santé en respectant les règles de durée, fréquence et intensité modérée et l’objectif de plaisir, pour apporter tous les bénéfices attendus pendant cette période de la maternité.