Par Emmanuel Brunet, responsable recherche et performance à la FFC
Lors d’un effort physique, pour produire du mouvement, le corps humain va fournir de la chaleur (seulement ¼ de l’énergie produite sert au mouvement fonctionnel, les ¾ restants sont produits sous forme de chaleur). Afin d’éviter la surchauffe de l’organisme, celui-ci va donc enclencher différents mécanismes de thermorégulation, notamment l’activation de la transpiration. Ces pertes hydriques déshydratent le sportif. C’est tout d’abord pour cette raison qu’il est nécessaire d’hydrater l’organisme en ingérant des boissons à l’effort ou après l’effort. En effet, la déshydratation est responsable de phénomènes altérant la performance et la santé des sportifs. Par exemple, lorsque le sportif est déshydraté, son temps de réaction augmente, son temps limite de maintien à une puissance cible diminue, son ressenti de l’intensité de l’effort augmente… En cas de déshydratation sévère, il y a des risques importants de santé, pouvant aller jusqu’à la mort.
Aussi, l’effort en endurance, tel que généralement conseillé ou prescrit dans le cadre du cyclisme santé, sollicite des filières énergétiques dites « aérobies ». Lorsque le cycliste pédale pendant une à plusieurs heures, il va principalement puiser au sein de deux sources énergétiques : les lipides et les glucides. Cela dépend de l’intensité et de la durée de l’exercice.
Plus l’exercice est intense, plus le cycliste va consommer des glucides pour pédaler.
Plus l’exercice est long, plus la proportion des lipides pour produire l’énergie nécessaire peut devenir importante.
Généralement, les cyclistes ont suffisamment de stocks de lipides pour fonctionner de nombreuses heures. Ce n’est pas le cas des glucides.
Les glucides sont stockés dans le muscle, dans le foie et circulent dans le sang (la glycémie correspond au taux de glucose présent dans le sang). En une heure, lors d’un exercice de pédalage intense, le glycogène disponible peut être épuisé. Il est nécessaire d’apporter des glucides pour que le sang alimente en permanence ou par intervalles le muscle et/ou le foie afin de ne pas épuiser les stocks, voire de les reconstituer.
Si nous considérons l’effort d’endurance, pendant une à plusieurs heures, réalisé à diverses intensités, la première règle est de systématiser une boisson. En effet, des études montrent que l’organisme ne permet pas de poursuivre un exercice d’endurance au-delà d’une heure et trente minutes sans apporter de glucides. Cela dépend du statut hydrique, de l’état d’entraînement et des stocks en glycogène musculaire. C’est pourquoi nous souhaitons recommander cette règle d’une heure et trente minutes.
En dessous d’une heure et trente minutes, l’eau peut être suffisante car les réserves énergétiques seront suffisantes pour réaliser cet effort. Au-delà d’une heure, il peut se révéler nécessaire d’apporter des glucides, notamment par une boisson composée de glucose. Il n’y a pas de préférence sur la modalité d’apport glucidique (solide ou liquide). Néanmoins, on sait qu’il est nécessaire d’hydrater l’organisme. Le muscle ayant besoin de capter du glucose à l’effort, l’hydratation sera ainsi facilitée si la boisson est composée de glucides. C’est pourquoi nous recommandons uniquement la boisson comme apport glucidique. Au-delà d’une heure et trente minutes, on peut ajouter des formes solides d’apport glucidique : pâtes de fruits (cf recette page 70), barres de céréales, fruits…
Si l’effort est intense, notamment lorsqu’il comporte des entraînements à haute intensité et/ou par intervalles, il convient certainement d’être prudent car, selon l’état d’entraînement et les rations alimentaires des jours précédents, les réserves glucidiques de l’organisme pourront être épuisées et peuvent s’épuiser plus rapidement au cours de l’entraînement.
Augmenter l’intensité d’entraînement va faire augmenter le taux d’utilisation des glucides pour fournir l’énergie nécessaire. Si les stocks s’épuisent, le muscle ne pourra plus produire autant d’énergie. Dans ce cas, l’entraînement prévu peut être moins efficace, voire stoppé, car impossible à réaliser. Il y a également un enjeu de sécurité car le vélo est généralement pratiqué sur la voie publique. En cas de forte diminution des réserves énergétiques, associée à une déshydratation (la boisson ne permet pas de combler entièrement cette dernière), le temps de réaction et la capacité de concentration sont diminués. Cela peut être à l’origine de chutes ou d’accidents qu’il est nécessaire de prévenir.
La règle serait donc de systématiser une boisson avec glucides pour tout entraînement intense.
Enfin, lorsque les entraînements sont cumulés plusieurs jours, il peut être difficile de bien reconstituer les stocks en glycogène et pour cette raison, il peut être souhaitable d’apporter systématiquement du glucose.
Concernant les volumes, il faut retenir le volume de 500ml / heure en situation météo normale. Dans le cas d’un environnement chaud, ce volume peut être doublé.
La teneur en glucides conseillée est de 30 à 60g par heure. Cette dose est à affiner individuellement car plus la concentration est importante, plus on risque d’avoir des sensations d’inconfort gastrique. Plus il fait chaud, plus on doit également diminuer cette concentration. Pour une meilleure assimilation, il est également conseillé de multiplier les sources de glucides (glucose + fructose ou maltodextrines) et d’avoir un ajout de sodium.
Il est souhaitable d’opter pour des boissons iso ou hypotonique : l’eau se diffuse du compartiment le moins concentré vers le plus concentré pour diluer le compartiment et arriver à l’état d’équilibre de part et d’autre de la membrane cellulaire. La boisson peut ainsi être hypertonique (>280 mOsm/kg), hypotonique (<280 mOsm/kg) ou isotonique (280 mOsm/kg). Les boissons iso ou hypotoniques vont donc favoriser l’absorption de l’eau. Cette caractéristique s’explique par la concentration de la boisson en particules actives.
Les sirops aux fruits sont généralement composés de sucre et/ou glucose et/ou sirop de glucose/fructose. Il est important de bien vérifier ces ingrédients dans la liste des ingrédients (leur ordre est écrit par ordre de grandeur). Il est très important de s’assurer que le sucre et/ou le glucose ne sont pas les seuls ingrédients et que l’on puisse y trouver du fructose ou du jus de fruit. Il est cependant plus délicat d’avoir une assurance sur la répartition exacte.
Si le sirop propose une tenue en glucides de 80g pour 100ml, il faut donc prévoir 35 à 40ml de sirop par bidon de 500ml (certaines cuillères doseuses peuvent permettre d’avoir le bon dosage, la plupart mesurent 25 ml). Généralement, cela correspond au fait de tapisser le fond du bidon de sirop.
Il est donc possible de s’assurer de la bonne concentration en glucides autant pour le sirop que pour la boisson énergétique.
Précautions : bien vérifier que le sirop est composé de glucose et fructose. Pour cela, il faut lire la liste des ingrédients et s’assurer que le sucre et/ou le glucose ne sont pas les seules sources de glucides. On doit pouvoir y trouver du fructose ou du jus de fruit.
Souvent, le sirop comporte des acidifiants qui peuvent être néfastes.
En moyenne, les boissons énergétiques du commerce ont une teneur en glucides se situant aux alentours de 30 g / 500ml. Quelques rares boissons ne sont pas assez dosées (ce qui n’est pas très grave) et d’autres rares boissons sont beaucoup trop dosées (ce qui peut devenir inconfortable).
La majorité des boissons énergétiques du commerce utilisent différents glucides avec une proportion d’environ 50%. Quelques rares boissons sont beaucoup trop concentrées en glucides.
La majorité des boissons énergétiques sont bien dosées en sodium avec une teneur d’environ 30 g / 500 ml. Quelques rares boissons sont trop dosées (boisson salée) ou sous-dosée.
Enfin, la question des dosages n’est pas le seul argument qui permet de s’assurer dans la majorité des cas de l’intérêt d’une boisson d’effort. Souvent, il s’agit d’une boisson peu acide et qui permet des apports en micro-nutriments et vitamines intéressants, notamment les vitamines du groupe B et anti-oxydants. Pour ceux et celles qui peuvent avoir une pratique nomade incluant des déplacements, l’intérêt pratique est intéressant : les pots de boisson peuvent être facilement transportés en étant hermétique, ce qui est plus délicat avec la bouteille de sirop dans votre sac !
On dit souvent que la récupération fait partie de l’entraînement. Quel que soit son niveau, quelles que soient ses ambitions, quel que soit son âge, il est important de considérer la récupération après la pratique. Celle-ci permet de conserver ou augmenter sa condition physique, de limiter le risque de blessures, et donc d’améliorer sa capacité de performance.
Sitôt l’exercice terminé, il faut réhydrater l’organisme et lui apporter les sels minéraux perdus (le plus important étant le sodium). Boire de l’eau n’est pas suffisant car elle ne permet pas de se réhydrater correctement. L’organisme aurait une certaine mémoire de ce qu’il vient de perdre et ouvrirait ainsi davantage la porte aux boissons permettant de re-capter tout ce qu’il a pu perdre (on parle de FENÊTRE METABOLIQUE). La compensation des électrolytes n’est donc pas la seule question, les nutriments énergétiques doivent composer la boisson.
Au cours de l’effort, l’organisme a puisé dans ses réserves de glycogène. La récupération a donc pour rôle de les remplir à nouveau. Si les glucides sont apportés tout de suite après l’effort, la fenêtre métabolique est propice à la reconstitution des stocks, voire leur dépassement (surcompensation) si muscle et foie disposent d’un apport de glycogène. La première règle serait donc d’apporter des glucides dans sa boisson. On peut penser que la boisson de l’effort (du commerce ou maison) suffirait à reconstruire ces stocks. La question de l’osmolarité évoquée dans les boissons de l’effort reste applicable. Pour des efforts très intenses ou de très longue durée, l’organisme a besoin de protéines pour reconstruire le muscle et d’autres tissus. La consommation de protéines après un effort devient un élément important de la récupération, mais son dosage doit être adéquat. Là aussi, il faut profiter de la fenêtre métabolique (30 minutes après la fin de l’effort) pour favoriser cette assimilation.
L’exercice peut amener une acidification de l’organisme. Cela peut être favorisé par une alimentation acidifiante. Pour lutter contre l’acidose, il est recommandé de consommer des boissons alcalinisantes (boisson riche en bicarbonates, par exemple). Les eaux riches en bicarbonates de sodium sont St-Yorre (4 368 mg/l), Vichy Célestins (2 989 mg/l), Rozana (1 837 mg/l), Badoit (1 250 mg/l), Quézac (1 000 mg/l).
Les eaux seules ne permettront pas de bien réhydrater l’organisme, ni d’apporter les nutriments. La boisson doit donc venir en complément pour poursuivre l’hydratation de l’organisme et l’apport adéquat de sels minéraux.
Des études récentes ont mis en avant que le lait constitue la meilleure boisson post-entraînement pour réhydrater l’organisme (dans l’ordre, plus que l’eau, les boissons d’effort, sodas et jus de fruits). On peut donc penser que les boissons à base de lait, accompagnées de glucides peuvent constituer une excellente boisson de récupération. Néanmoins, si l’entraînement est très intense et ou très long, il faudrait boire une quantité de lait importante pour subvenir aux besoins. En effet, le lait demi-écrémé contient environ 3 % de protéines, 5 % de glucides mais aussi et surtout des vitamines (A, D, B) et des sels minéraux (calcium, potassium, magnésium…).
Les boissons de récupération sont assez variables. Comme évoqué plus haut, pour des efforts courts et peu intenses, la boisson de l’effort peut être prolongée. Dans la plupart des autres cas, la boisson de récupération semble plus adaptée compte tenu de sa concentration.
En moyenne, les boissons du commerce contiennent 10 à 15 g de protéines. Quelques boissons de récupération sont sous-dosées en protéines, il convient donc de lire les étiquettes pour s’approcher d’une teneur de l’ordre de 20 g. Attention à ne pas confondre boisson de récupération (avec des protéines) avec boisson hyper-protéinée ou boisson dédiée à la pratique de musculation visant à augmenter la masse musculaire. Comme pour l’effort, concernant les glucides, la recommandation est de l’ordre de 20 à 30 g, ce que l’on retrouve dans la majorité des boissons de récupération du commerce. La qualité au niveau des sels minéraux, vitamines et antioxydants n’est cependant pas toujours présente. Il convient donc de bien s’assurer de la teneur en sodium (>200 mg), potassium, magnésium, calcium, zinc, vitamines B, C et E.
Comme pour les boissons de l’effort, lorsque l’on est soumis à se déplacer, la boisson du commerce permet de s’assurer d’avoir une boisson qui se prépare au dernier moment, sans risques au niveau de sa conservation.
Pour être optimale et efficace, la boisson de récupération doit permettre de compenser toutes les pertes métaboliques dues à l’exercice. Cette boisson doit comprendre au minimum des minéraux et des oligoéléments, des glucides (comme pour l’effort) et des protéines. L’apport conseillé est de 1 g de glucides par kilo de poids de corps et par heure de pratique et de 15 à 20 g de protéines par heure. On conseille généralement 500 ml/heure pour une bonne vidange gastrique.
Par exemple un cycliste de 60 kg ayant réalisé un entraînement intense de 2 heures devra ingérer une boisson avec : 120 g de glucides et 30 g de protéines.
Plus tard, le cycliste peut compléter par une eau pétillante riche en bicarbonate.
D’une manière générale, que ce soit pour les boissons de l’effort ou pour les boissons de récupération, veillez à avoir une alimentation équilibrée, variée et une hydratation optimale (contrôlez régulièrement la couleur de vos urines pour vous en assurer), cela aura encore plus d’impact que la qualité de vos boissons d’effort ou de récupération.
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