Le surentraînement: un diagnostic d’élimination ?

Le surentraînement: un diagnostic d’élimination ?
Le surentraînement: un diagnostic d’élimination ?

En règle générale, les sportifs s’entraînent pour augmenter leur performance (Kreher et Schwartz, 2012). Cependant, le risque de charges accrues et/ou d’une récupération inadéquate n’est pas rare et peut même amener à un syndrome de surentraînement (Halson, 2014 ; Meeusen et coll., 2013 ; Cadegiani et Kater, 2017). La préparation est donc un savant mélange entre les charges d’entraînement et les périodes de récupération nécessaires aux adaptations physiologiques afin de ne pas provoquer de fatigue contre-productive.

Le syndrome de surentraînement, nommé « surentraînement » dans l’ensemble de l’article, doit-il être évoqué en première intention dès lors que le sportif est confronté à une fatigue chronique et/ou à une baisse de performance ?

Par Olivier Coste, médecin, commission nationale médicale

La fatigue, un état multiple

Le sportif peut être confronté à plusieurs types de fatigue au cours de sa carrière. Si la fatigue aiguë occasionnée par les entraînements n’est pas problématique en soi, il n’en est pas de même pour les états de fatigue qui se prolongent dans le temps et se répercutent sur le niveau de performance.

La fatigue doit être considérée comme un continuum, le passage d’un état de fatigue à un autre étant plutôt arbitraire, la distinction s’établissant sur la durée du processus. Toutefois, plusieurs entités propres au sportif ont été décrites. Parmi elles, le surentraînement nommé overtraining par les auteurs anglo-saxons se distingue par la durée prolongée des symptômes et de la baisse de performance. Il est possible de faire l’analogie avec le burn-out, qui résulte d’un investissement prolongé dans des situations de travail exigeantes, du fait que l’épuisement concerne différentes sphères : physique, émotionnelle et mentale (Schaufeli et Greenglass, 2001).

Mais peut-on envisager le surentraînement comme la seule fatigue chronique du sportif ?

Le syndrome de fatigue chronique

Le syndrome de fatigue chronique a été exposé chez le sportif comme chez le non-sportif. Il est défini par une fatigue disproportionnée à l’intensité de l’effort, s’étalant sur une durée d’au moins 6 mois et sans cause évidente (Shepard, 2001). Sa prévalence est faible puisqu’elle est probablement inférieure à 0,1% dans la population générale ce qui peut être expliqué par un manque de critères clairs et standardisés.

Ce syndrome est associé à un excès d’activité physique, des carences nutritionnelles, des troubles immunitaires, une infection virale… (tableau 1). Néanmoins, aucune de ces associations n’est assez robuste. Il semblerait qu’il s’agisse plutôt de conséquences que de causes sous-jacentes.

Dans une population sportive, il est plutôt difficile de faire la distinction entre un niveau normal de fatigue, le surentraînement, une fatigue qui indique une réponse médicale et le syndrome de fatigue chronique (Fry et coll., 1991). Le surentraînement présente des similitudes avec le syndrome de fatigue chronique (Shepard, 2001).

Néanmoins, il semble y avoir quelques points de distinction d’avec la fatigue chronique puisque cette dernière peut survenir chez des individus relativement sédentaires. D’autre part, les signes de dommages musculaires sont généralement légers voire inexistants (McCully et coll., 1996).

Au-delà de ces éléments, existe-t-il des arguments en faveur du surentraînement ?

Le diagnostic de surentraînement

Le surentraînement est à envisager devant toute incapacité à performer à un niveau optimum précédemment réalisé malgré la poursuite intensive de l’entraînement.

Son diagnostic repose sur un faisceau d’arguments. Aucun séparément ne permet, à lui seul, d’en établir le diagnostic. Le médecin devra s’appuyer sur différentes approches : symptômes, examen clinique, examens complémentaires, biologiques, explorations fonctionnelles, test d’effort et questionnaire.

Si la majorité des explorations sont d’ordre médical, l’utilisation de questionnaire est intéressante car à la portée des entraîneurs et même des sportifs. L’auto-questionnaire construit par la SFMES est un bon outil d’éclaircissement.

Plus récemment, un arbre décisionnel a été construit suite à un consensus entre le Collège européen des sciences du sport et le Collège américain de médecine du sport (Meeusen et coll., 2012).

Enfin, il est intéressant de savoir que le diagnostic proposé est dépendant de la spécialité du médecin qui le pose. Un médecin du sport aura tendance à trouver plus facilement des preuves de surentraînement.

Conclusion

En pratique, le surentraînement est souvent mis en cause lors d’un état de fatigue chronicisé chez le sportif ou d’une altération des performances. Néanmoins, la rareté de cette entité et la difficulté de la détecter amènent plutôt à le considérer comme un diagnostic « d’après élimination », nécessitant en première intention d’exclure une pathologie médicale (asthme, anémie, hypothyroïdie, déficit immunitaire, syndrome de fatigue chronique, dépression…). De plus, les symptômes du surentraînement ne sont pas spécifiques et pourraient être des symptômes de nombreux états pathologiques. Enfin, les mécanismes amenant à ce syndrome sont inconnus, d’ailleurs certains auteurs parlent de « syndrome de sous-performance inexpliquée » (Budgett et coll., 2000)

k Force.” Eur J Sport Sci. 2006 ; 6(1):1–14. ✱