Les douleurs de la face externe du genou sont en grande majorité liées aux frottements d’un gros tendon sur le fémur, le fameux « syndrome de l’essuie-glace ». Mais pas toujours ! Si vos douleurs persistent malgré un traitement classique, vous faites peut être partie des cas atypiques !
A la face externe du genou, il existe un gros tendon plat qui va du bassin jusqu’au tibia. Cette large bandelette porte le nom de « fascia lata ». Tout en haut, il se transforme en muscle. Devant, il devient le « tenseur de fascia lata »… on aurait presque pu le deviner ! Derrière, il correspond au « grand fessier superficiel ». Ces muscles et ce tendon ont pour mission de tirer sur le bassin quand la jambe opposée n’est pas en appui sur le sol.
Ainsi, le travail de cette chaîne musculo-tendineuse évite à votre buste de basculer de droite à gauche à chacune de vos foulées. Grâce à cette mécanique d’équilibration alternative, répétitive et permanente, vous ne ressemblez pas à un pantin désarticulé quand vous courez !
L’os de la cuisse, le fémur, présente à son extrémité inférieure un relief latéral qui peut venir frotter sur le fascia lata, notamment en cas de jambes arquées, d’affaissement des appuis ou d’augmentation inconsidérée du kilométrage. L’irritation locale est à l’origine d’une ampoule profonde appelée « bursite » qui devient rapidement douloureuse.
Classiquement, le traitement passe par des semelles ou une infiltration, par un travail de renforcement donnant plus de tonicité à votre foulée, par la révision de la charge d’entraînement et par plus de variété dans vos pratiques. Le mécanisme lésionnel qui dépend de l’appui sur une seule jambe et de la répétition du geste vous explique pourquoi cette blessure se nomme aussi : « Le genou du coureur ». En effet, elle n’existe pas à vélo, en elliptique ou en rameur ! Elle est presque absente dans les sports incluant des changements de direction comme le foot ou le tennis.
Voilà pourquoi j’aime dire à mes étudiants : « Toute douleur de la face externe du genou chez un coureur est un syndrome de l’essuie-glace… si vous ne craignez pas de vous tromper une fois sur dix ! »
Une souffrance articulaire de la rotule se présente souvent comme une douleur externe, notamment chez la joggeuse. En effet, si vous avez les jambes en X et un bassin relativement large, le gros muscle de la cuisse, le quadriceps, tire la rotule légèrement vers l’extérieur. De fait, ce petit os circulaire est comprimé de façon asymétrique dans le couloir osseux où il coulisse. Cette déviation est majorée si votre foulée est pronatrice et que votre pied s’écrase en rotation externe à chaque appui. Elle s’accentue encore si le point d’accrochage de la rotule sur le tibia est décalé vers l’extérieur et si le rail de glissement rotulien est insuffisamment creusé.
Ces anomalies morphologiques sont fréquemment associées et sont regroupées sous le nom de « dysplasie rotulienne ». Cette anatomie à risque est en partie d’origine génétique. Elle est également favorisée par le manque d’activité physique pendant la croissance, au moment où les os et les articulations se moulent et s’adaptent aux contraintes. En effet, les pressions mécaniques au cours de l’enfance écrasent la rotule dans son couloir et contribuent à creuser ce dernier et à stabiliser l’articulation.
UNE ROTULE FORCÉE RESSEMBLE À UN ESSUIE-GLACE
L’appui répété sur une seule jambe tend à donner une forme de () aux membres inférieurs. Les douleurs peuvent survenir à l’occasion d’un surmenage ponctuel : initiation à la course ou augmentation de la charge d’entraînement en vue d’une compétition. Dans ces circonstances, la fatigue de la cuisse altère la trajectoire de la rotule et aggrave l’irritation du cartilage. On parle de « rotule forcée ».
Le traitement passe par un réaménagement du programme d’entraînement associé à un reconditionnement très progressif à l’effort. On peut y adjoindre un peu de kinésithérapie afin que le quadriceps guide la rotule plus harmonieusement dans son couloir.
Il est également recommandé d’acquérir une foulée plus tonique avec un pied qui s’écrase moins vers l’extérieur ; une paire de semelles orthopédiques pourvues d’un soutien de voûte, réalisées par un podologue, va dans le même sens.
Des compléments alimentaires nourrissant le cartilage accompagnent avec pertinence cette stratégie mécanique. En cas d’irritation importante du cartilage associée à un gonflement du genou, une infiltration se révèle parfois opportune. Lorsque l’articulation reste sèche alors que la douleur est invalidante, c’est l’injection de plaquettes ou de lubrifiant biologique qui se montre plus adaptée. On parle respectivement de « PRP » et de « viscosupplémentation ».
Au centre du genou, on trouve les ménisques. Ces structures en forme de croissant sont conçues pour favoriser l’emboîtement entre l’extrémité du fémur convexe et celle du tibia qui est plate. Les ménisques glissent et se décalent légèrement vers l’arrière au cours de la flexion du genou, préservant ainsi la congruence articulaire dans toutes les positions. Ils pivotent aussi un peu car le genou tourne de quelques degrés pendant l’extension.
Le ménisque situé à la face interne du genou sert plutôt d’axe de rotation alors que le ménisque externe se situe en périphérie et se déplace plus amplement. Ainsi, le ménisque interne s’abîme plus volontiers sur de brusques pivots, le ménisque externe se blesse lorsque vous répétez les mouvements de flexion et d’extension. De fait, la course à pied est pourvoyeuse de lésion du ménisque externe, notamment chez le compétiteur jeune et rapide. Là encore, renforcement et infiltration parviennent parfois à vous soulager. Néanmoins, la chirurgie finit souvent par être nécessaire. Si la fissure se situe en périphérie du ménisque, en zone vascularisée, il est louable de tenter une suture méniscale.
LE MÉNISQUE EXTERNE EST UNE BLESSURE DE COUREUR RAPIDE
Pour donner toutes ses chances à la cicatrisation, l’arrêt de la course et de l’entraînement intensif est de l’ordre de 4 à 6 mois. Quand la fissure est plus centrale, aucun vaisseau n’est présent pour reconstruire un tissu de jonction, la suture est sans intérêt et il faut enlever la petite languette qui gêne dans l’articulation. La reprise est plus rapide mais doit rester prudente. En effet, il est nécessaire que le cartilage s’adapte à un surcroît de travail provoqué par le manque d’amortisseur. Cette fois, il faut patienter 2 à 3 mois.
À la face externe du genou, le péroné vient au contact du tibia. Le premier n’est qu’un os stabilisateur, il est sur le côté et ne supporte aucun poids. En revanche, il se comporte comme un axe de rotation, vestige de notre passé arboricole où nous attrapions les branches en faisant pivoter nos pieds. Bipède depuis 6 millions d’années, nos membres inférieurs ont gagné en stabilité et perdu en mobilité.
Nos membres supérieurs ont conservé cette capacité à faire tourner nos avant-bras, on parle de « pronosupination ». À la face externe du genou, l’articulation entre le péroné et le tibia est appelée « péronéo-tibiale supérieure » ou PTS. Elle assure encore un peu de rotation mais pas trop… entre quadrupédie et bipédie sont cœur balance… Ainsi un appui avec changement de direction peut-il forcer ses capacités de rotation. Sa membrane se déchire, c’est une entorse de la PTS. À moins que le péroné se déplace légèrement et reste coincé, c’est la « subluxation ».
Ce phénomène peut également se produire à l’occasion d’une entorse de cheville. Au cours de ce traumatisme, le ligament de la cheville tire sur le péroné et provoque un léger glissement de ce dernier qui, bien évidemment, se répercute au sommet de cet os long ! Vous l’avez compris, cette blessure survient plus volontiers chez le traileur qui dévale les pentes entre les ornières, les pierres et les racines.
En cas de déplacement léger, les techniques ostéopathiques font des merveilles. Attention, dans ces circonstances et en cas de simple entorse de la PTS, la membrane articulaire doit prendre le temps de cicatriser. La course lente sur terrain régulier peut être reprise entre 7 et 10 jours. Une petite circulaire de strap étroite et pas trop serrée, placée juste sous la tête du péroné, peut contribuer à sa stabilisation. Crapahuter en terrain difficile nécessite souvent 3 à 6 semaines.
Il existe aussi un biceps dans la jambe. En anatomie comparée, il ressemble à son jumeau du membre supérieur. En haut, il s’accroche sur le bassin et sur le fémur alors que son frère s’insère sur l’omoplate et l’humérus. En bas, tous deux adhèrent aux petits os stabilisateur et rotateur, respectivement le péroné et le radius. Le biceps du membre inférieur plie le genou et le fait tourner légèrement vers l’extérieur. Celui du bras fléchit le coude et met la paume de la main vers le haut. Le biceps de la jambe remplit également un rôle de hauban latéral. Comme le fascia lata du syndrome de l’essuie-glace, il évite que les jambes ne soient trop arquées au cours de la prise d’appui.
De fait, si vous avez les membres inférieurs en forme de parenthèses (), il lui arrive de souffrir de tendinite. De façon plus anecdotique, cette blessure survient parfois à l’occasion d’un changement de semelles correctrices, désormais équipées d’un soutien de voûte plantaire trop volumineux.
Ces circonstances engendrent parfois des contractures des muscles stabilisant la cheville, les péroniers latéraux. La douleur peut alors remonter sur tout le corps musculaire, juste sous le genou et laisser penser à un syndrome de l’essuie-glace. Le traitement habituel de la tendinite du biceps est une paire de semelles pourvues de bandelettes externes qui font rentrer légèrement les genoux.
Cette prescription peut s’accompagner de compléments nutritionnels et d’un peu de kinésithérapie destinée à accompagner la récupération du tendon. Plus rarement, le biceps souffre un peu au-dessus du genou, à la jonction entre le tendon et le muscle. Il s’agit du site privilégié des claquages du biceps qui surviennent volontiers à l’occasion d’une séance de fractionné ou de côte. Là encore, rééducation et compléments nutritionnels se révèlent efficaces, idéalement associés à la poursuite de l’activité sous le seuil douloureux.
Tous les os peuvent être victimes de fracture de fatigue ! Cette lésion correspond à une réelle fissure osseuse complète mais progressive d’une zone soumise à des microtraumatismes répétés. Le mécanisme est comparable à la torsion itérative d’un fil de fer qui finit inévitablement par se rompre.
Les fractures de fatigue plus classiques surviennent chez le coureur et se localisent dans les petits os du pied, dans le talon ou dans le tibia. Mais il faut y penser systématiquement quels que soient l’endroit et la discipline sportive. Par exemple, les golfeurs enchaînant les swings au practice peuvent être victimes de fracture de fatigue… de côte ! De fait, de façon moins classique, la course à pied peut engendrer des fractures de fatigue du compartiment externe du genou.
TOUS LES OS PEUVENT ÊTRE VICTIMES DE FRACTURE DE FATIGUE
Il est à noter qu’elles se produisent aussi en randonnée chez des patients plus âgés victimes d’ostéoporose. Les rhumatologues parlent de « nécrose du condyle externe fémoral » reconnaissable à la radio par sa texture très dense et très blanche. Cependant, il s’agit d’une authentique fracture de fatigue dont le trait est bien visible lorsqu’elle est diagnostiquée précocement sur l’IRM.
Chez le coureur plus jeune, elle se localise également sur la partie haute du tibia appelée « plateau tibial ». Ces lésions osseuses peuvent être confondues avec un « syndrome de l’essuie-glace » car elles se déclarent dans des circonstances voisines, à savoir une pratique récente ou un accroissement rapide du kilométrage. Ainsi, lorsque le tableau est atypique, une IRM est opportune pour corriger un diagnostic hâtif fondé sur un argument de fréquence.
Le traitement ne comporte pas d’immobilisation ou de décharge strictes. Au contraire, il serait inapproprié d’aggraver le déconditionnement osseux à l’origine même de cette blessure. Aussi faut-il préserver une activité physique juste en deçà du seuil douloureux afin de préserver la densité osseuse. Pour cela, vélo, elliptique, marche avec bâtons puis trottinement constituent la progression adaptée sur environ 3 à 4 mois. Des compléments nutritionnels à visée osseuse s’y adjoignent en synergie : vitamine D, calcium, silicium, consoude, etc.
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